Une longévité exceptionnelle sous surveillance
Fruit de plus de 40 ans de suivi d'individus bagués dès la naissance par la Tour du Valat, cette vaste étude menée en Camargue sur le Flamant rose (Phoenicopterus roseus), l'une des espèces d'oiseaux les plus longévives sous nos latitudes (jusqu'à 50 ans), montre que les décisions comportementales, ici, migrer ou non, façonnent profondément les trajectoires de vie. "Chez les flamants roses on observe que les migrateurs paient un coût initial, mais leur vieillissement est ensuite plus lent" explique Hugo Cayuela.
Des choix de vie qui ne sont pas sans conséquences
Les flamants qui ne migrent pas appelés résidents, bénéficient d'une probabilité de reproduction plus élevée au début de leur vie adulte. Mais ces avantages précoces se retournent contre eux avec l'âge puisqu'ils présentent une sénescence (c'est à dire une baisse des performances de survie et de reproduction) plus marquée en fin de vie. A l'inverse, les migrateurs subissent un risque de décès plus important au début de leur vie, mais pour ceux qui survivent, leur déclin de reproduction et de survie s'opère plus lentement. Malgré ces différences de sénescence, les résidents vivent en moyenne plus longtemps que les migrateurs, soulignant ainsi les conséquences à long terme de ces choix de vie.
Une avancée majeure dans l'étude du vieillissement
Alors que les effets de la migration sur la survie et la reproduction avaient été abondamment documentés, son rôle dans la sénescence restait largement ignoré. " Ce qu'on apporte, c'est le regard sur la sénescence, un angle rarement exploré car il faut des données de long terme pour l'étudier", souligne Sébastien Roques, co-auteur de l'étude. Le caractère partiellement migrateur de l'espèce a permis d'observer des "variations intraspécifiques" de vieillissement.
Et après ?
Ces travaux montrent que la migration joue un rôle essentiel dans le cycle de vie de milliers d'espèces, et in fine sur les trajectoires de vie des animaux. Cependant, "n'est pas flamant qui veut". Pour Hugo Cayuela, il est donc "possible que les conséquences de la migration ne soient pas similaires chez toutes les espèces animales", ce qui appelle à de futures recherches sur le sujet. Par ailleurs, ces travaux sur les oiseaux soulèvent la question de "l'impact des décisions de déplacement chez l'humain, dont les conséquences sur le vieillissement restent encore aujourd'hui mal connues", conclut ainsi le chercheur.