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Shedule

Place salle de conférence de la Bibliothèque Universitaire (Domaine de la Doua, 20 avenue Gaston Berger, Villeurbanne)

THÈSE

Soutenance de thèse de Rémi Tuffet

Vers une écologie évolutive des éléments génétiques mobiles bactériens : application à l’antibiorésistance

Composition du jury

François Massol (CIIL - DR) : Rapporteur

Yannis Michalakis (IRD - DR) : Rapporteur

Aude Bernheim (Institut Pasteur - DR) : Examinatrice

Oana Dumitrescu (Université Lyon 1 - MCU) : Examinatrice

Lulla Opatowski (Université de Versailles Saint Quentin - PU) : Examinatrice

Marie Touchon (Institut Pasteur - CR) : Examinatrice

Xavier Charpentier (CIRI - CR) : Directeur de thèse

Samuel Venner (Université Lyon 1 - MCU) : Co-directeur de thèse

Thomas Koffel (Université Lyon 1 - MCU) : Encadrant de thèse

 

Il sera également possible de suivre la soutenance en visioconférence (le lien sera envoyé prochainement).

Enfin, la soutenance sera suivie d’un pot dans la salle de convivialité du LBBE (Bâtiment Mendel, 1er étage). 

 

Résumé de la thèse :

Avec l’avènement de la génomique bactérienne, le concept de pangénome bactérien a émergé pour rendre compte des variations génétiques intra-espèce. Le pangénome d’une espèce est défini comme la somme du génome cœur et du génome accessoire. Ce génome accessoire est en grande partie constitué d’éléments génétiques mobiles (MGEs) qui sont des entités génétiques capables de transferts horizontaux. En outre, ces MGEs sont connus pour être porteurs de nombreux gènes d’antibiorésistance, et ainsi vecteurs de cette résistance dans les communautés bactériennes. Comprendre les dynamiques éco-évolutives des MGEs qui circulent dans les populations et communautés bactériennes est donc un enjeu majeur pour la santé mais aussi pour comprendre l’évolution des génomes bactériens. Dans cette optique, ma thèse propose de considérer les MGEs au sein d’une population bactérienne comme une communauté d’espèces en compétition pour les bactéries hôtes et d’appliquer les théories de l’écologie pour mieux comprendre les dynamiques de ces entités et leur assemblage dans les génomes bactériens.

Dans une première partie, je me suis intéressé à des MGEs suspectés d’interférer avec la transformation naturelle, un mécanisme de transfert horizontal contrôlé par les bactéries permettant l’acquisition et l’élimination de séquence génétique dont les MGEs. Au travers d’un modèle inspiré de l’écologie des communautés, j’ai testé l’hypothèse que la stratégie d’inhibition de la transformation naturelle joue un rôle clé dans la dynamique éco-évolutive de ces MGEs. Au moyen d’un modèle numérique paramétré expérimentalement, j’ai montré que les MGEs qui inhibent fortement la transformation naturelle sont favorisés en environnement stochastique. Mes résultats, en adéquation avec les observations génomiques, révèlent que cette stratégie d’inhibition de la transformation, en maximisant la persistance des MGEs, favorise la prévalence des gènes de résistance aux antibiotiques chez Acinetobacter baumannii classée par l’OMS comme une priorité absolue dans la lutte contre l’antibiorésistance.

Dans une seconde partie, j’ai construit un modèle plus général de la dynamique des MGEs dans les populations bactériennes qui suggère que la génomique gagnerait à mobiliser les théories issues de l’écologie pour mieux comprendre la diversité des MGEs. En intégrant d’une part le partitionnement des niches écologiques et des processus d’innovation parmi les MGEs, et d’autre part de la stochasticité démographique et la dispersion des cellules bactériennes hôtes des MGEs, je montre l’émergence de la coexistence de clusters de MGEs occupant différentes niches avec des MGEs coexistant de manière quasi-neutre au sein des clusters. Ces résultats sont en faveur de l’unification des théories de la biodiversité appliquées aux MGEs. Finalement dans une troisième partie, j’utilise le même cadre conceptuel pour montrer l’importance des compromis entre les traits des MGEs (leur taux de transfert horizontal, leur niveau de résistance, le taux de réplication de leur bactérie-hôte et leur taux de perte) pour comprendre leurs assemblages. Je montre alors que la forme des compromis détermine les clusters de MGEs les plus compétitifs : des compromis convexes ou linéaires sélectionnent des MGEs spécialisés alors que des compromis concaves sélectionnent des MGEs généralistes. Cette thèse propose ainsi un point de vue nouveau pour aborder l’organisation de génomes bactériens et permet d’envisager une extension aux

approches génomiques plus classiques. Mon travail encourage ainsi à considérer explicitement les formes de conflits et coopérations entre les MGEs et les bactéries, et

entre les MGEs eux-mêmes en environnement fluctuant. Par ailleurs, ce système composé des bactéries et de leur MGEs, en lien avec l’exposition aux antibiotiques, pourrait constituer un modèle biologique puissant pour tester les théories de la biodiversité.