Du

Shedule

Place Amphithéâtre du CNRS

THÈSE

Soutenance de thèse de Thibault Tamin

Interactions entre dispersion et personnalité, et conséquences sur le succès reproducteur. Approches empiriques dans une population fragmentée d'un petit passereau

Résumé:
La dispersion est un trait d’histoire de vie majeur permettant aux individus de répondre aux variations de leur environnement, d’origine naturelle ou anthropique, en s’installant dans des habitats plus favorables pour leur reproduction. La dispersion impose cependant des coûts, par exemple en temps et énergie, et de nombreuses études ont maintenant montré que la dispersion pouvait être associée à différents traits phénotypiques, notamment comportementaux, permettant aux individus d’alléger ces coûts. Ces syndromes comportementaux de dispersion comprennent en particulier les traits de personnalité, qui peuvent bénéficier aux individus lors de la recherche de, ou l’installation dans, un nouvel habitat. En conséquence, les dispersants ne représentent souvent pas un échantillon aléatoire de la population. Néanmoins, les études se limitent souvent à un seul trait de personnalité, quand plusieurs traits pourraient être liés entre eux et/ou impliqués dans différentes phases de la dispersion ; elles se basent également souvent sur des mesures uniques et des approches corrélatives. Ces limitations peuvent empêcher une compréhension poussée des liens décrits jusqu’ici entre dispersion et traits de personnalité.

Dans cette thèse, nous avons étudié les relations possibles entre la dispersion (passée et future) et trois traits de personnalité, l’agressivité, la néophobie et la témérité, dans une population fragmentée de gobemouches à collier (Ficedula albicollis). Nous avons utilisé des approches corrélatives à long terme (mesure de traits de façon répétée intra- et inter-années sur une large fraction de la population) ainsi que deux expériences intra-population réalisées précédemment (translocation et colonisation), pour tester la présence de syndromes comportementaux associés à la dispersion. Dans la population d’étude, les individus présentent un syndrome comportemental entre l’agressivité et la témérité qui a potentiellement des conséquences sur le succès reproducteur des individus. Les traits de personnalité ainsi que le syndrome décrit sont liés au statut de dispersion inter-parcelle, à la fois pour la dispersion de reproduction chez les adultes expérimentés et pour la dispersion natale avec des effets à long terme. Ces liens s’observent à la fois par rapport au statut passé et à la dispersion future, ce qui suggère qu’il s’agit non pas de modifications comportementales temporaires consécutives à la dispersion, mais bien d’associations à long terme qui pourraient alors impacter la valeur sélective des individus. Les approches expérimentales confirment que le profil de personnalité des individus peut façonner leurs décisions de s’installer dans un nouvel habitat, soit préalablement non-occupé (colonisation) soit après un déplacement forcé mimant les contraintes de la dispersion (translocation). Enfin, l’appariement assortatif par rapport au statut de dispersion observé dans la population peut s’expliquer partiellement par un choix de partenaire en fonction de traits de personnalité liés à la dispersion. Cette thèse révèle donc des relations importantes entre dispersion et traits multiples de personnalité dans cette population. Ces deux types de traits pouvant impacter la valeur sélective des individus indépendamment l’un de l’autre, des mesures et analyses complémentaires pourraient déterminer si leur association est susceptible d’augmenter le bénéfice au-delà d’un simple effet additif, ainsi donc d’être soumise à une intégration fonctionnelle, même si les traits de personnalité ne sont pas héritables dans cette population. Les relations décrites ici permettent d’apporter des éléments importants pour la compréhension des mécanismes sous-tendant les syndromes comportementaux de dispersion et leurs conséquences évolutives dans la population d’étude.

Jury: Dominique Allainé, Jean Clobert (en visio), Léa Lansade, Marion Nicolaus, Frédéric Sèbe et Blandine Doligez